Le prix Acfas Adrien-Pouliot 2022 remis à Sylvie Nadeau de l’UdeM
Le prix Acfas Adrien-Pouliot 2022, pour des actions et des travaux menés en collaboration avec la France, est remis à Sylvie Nadeau, professeure à l’École de réadaptation de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal. Le Consulat général de France à Québec est très fier de s’associer à ce prix.
Le domaine de recherche de la lauréate est la biomécanique appliquée. Elle s’est tout particulièrement intéressée à la mobilité des personnes âgées et de celles vivant avec des atteintes neurologiques et orthopédiques. Ces thématiques touchant la population de nombreux pays, elle établit dès le début de sa carrière des collaborations outre-frontières, et spécifiquement avec la France. De fait, nos deux pays vivent les mêmes défis sur le plan de l’adaptation et de la réadaptation des personnes âgées et de celles vivant avec des déficiences physiques.
Après six ans de pratique clinique, elle termine son doctorat en trois ans. Elle franchit ce jalon décisif en obtenant de plus la médaille d’or du gouverneur général pour la meilleure thèse de doctorat de l’Université de Montréal (1997). Suivront deux années de formation postdoctorale au CNRS à Marseille avec des sommités en évaluation de la posture. Le postdoc sera complété avec un séjour ontarien à l’Université Queens, puis un autre à l’Institut de réadaptation en déficience physique de Québec.
Nommée professeure adjointe à l’École de réadaptation de la Faculté de médecine de l’UdeM dès 1999, elle met rapidement sur pied un laboratoire de pathokinésiologie au Centre de recherche interdisciplinaire en réadaptation du Montréal métropolitain, ce qui fera d’elle, au Canada et dans le monde, une leader en biomécanique appliquée en réadaptation. Son laboratoire 3D d’analyse du mouvement est alors un des premiers à Montréal à être dirigé par une professionnelle clinicienne issue du secteur des sciences de la santé. Cette singularité et les découvertes de la chercheuse relatives aux anomalies de la « démarche » et du « lever debout » chez les personnes souffrant d’atteintes neurologiques et orthopédiques – mais aussi chez les enfants atteints d’une scoliose ou de dystrophie musculaire aux prises avec des problèmes de marche – attirent rapidement des étudiants et des chercheurs de France. De là, les partenariats Québec-France vont grandement se multiplier.
Si la recherche en médecine de rééducation-réadaptation affiche une relative ancienneté en France – années 1950 –, celle concernant la kinésithérapie et la physiothérapie est plus récente. Or, la Pre Nadeau, déjà perçue comme une pionnière mondiale dans ce domaine, offre tout naturellement de partager l’expérience québécoise avec ses homologues français. Connaissant le caractère novateur et unique des travaux de la scientifique montréalaise, les chercheurs de Bordeaux, Marseille et Grenoble, leaders en France pour leurs travaux sur la posture, la marche, la fonction motrice et la cognition spatiale, l’invitent à se joindre à leurs équipes de laboratoire. Celles-ci creuseront ensemble des sujets pointus qui affectent la mobilité des personnes ayant subi un AVC, tels les problèmes d’asymétrie et d’équilibre lors de la marche, de perception de l’environnement et plus récemment de latéropulsion (tendance à dévier latéralement) en station assise et debout, et même lors de la marche. Elles tenteront de trouver des entraînements réduisant l’impact de ces problèmes.
Des sujets de recherche, pour le moins inattendus, viendront aussi jalonner les séjours en France de Sylvie Nadeau. En effet, elle est approchée par un partenaire industriel français – le géant Essilor INT – qui souhaite tester de nouveaux verres progressifs réduisant un effet perturbant susceptible de provoquer une chute chez certaines personnes empruntant des escaliers. Si l’entreprise se tourne alors vers la spécialiste québécoise, c’est que celle-ci avait déjà développé dans son laboratoire un escalier tout à fait équivalent à ce que l’industriel recherchait, et qui n’existait tout simplement pas encore en Europe.
Depuis le début de son parcours, Sylvie Nadeau a aussi assuré des rôles stratégiques et structurants pour la recherche au Québec. Entre 2005 et 2016, par exemple, elle fut présidente du conseil scientifique, puis directrice du Réseau provincial de recherche en adaptation-réadaptation, l’un des plus anciens réseaux du Québec dont l’acronyme – REPAR – révèle subtilement toute la finalité des travaux que l’on y mène. Avec son implication dans la création et le fonctionnement du regroupement stratégique INTER (Ingénierie de technologies interactives en réadaptation), elle possède tous les outils pour rallier les équipes de recherche de la France et du Québec, et de nombreuses activités d’échanges et de réseautage en résultent.
La rigueur scientifique de Sylvie Nadeau et sa connaissance fine de l’état de la rééducation-réadaptation au Québec et en France expliquent sa participation à un accord majeur conclu entre l’Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec (OPPQ) et le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes (CNOMK) là-bas. L’accord offre aux professionnels du domaine la possibilité d’exercer d’un côté et de l’autre de l’Atlantique. À l’automne 2015, devenue directrice des programmes de physiothérapie à l’Université de Montréal, elle lance avec ses collègues des ententes avec cinq écoles de kinésithérapie en France pour des échanges étudiants et des collaborations entre professeurs-chercheurs.
Cette collaboration avec la France ne cesse de s’étendre. Un autre exemple récent est celui de la collecte de données menée au Musée des Beaux-Arts de Montréal, qui a débuté en décembre 2019, documentant la mobilité de participants et leurs réponses psychologiques à une visite muséale. Cette idée a conduit l’équipe conceptrice à s’intégrer à VITALISE, un projet qui bénéficie du financement européen HORIZON 2020 d’infrastructure majeure de « living lab ». Certains résultats de ces travaux seront présentés lors d’un congrès à Marseille en décembre prochain.
Sylvie Nadeau a annoncé qu’elle sera à Marseille dès l’automne et elle entrevoit un retour à Grenoble au printemps 2023, dans le cadre d’une année d’études et de recherche. Elle se révèle une cheffe de file incontestable de la recherche en santé et une fière ambassadrice des collaborations en réadaptation physique entre le Québec et la France.